Les marchés seraient-ils sexistes ? Au moins périodiquement, si l’on en croit une étude publiée par la revue «Travail, Genre et Société» du CNRS et menée par Michel Ferrary, professeur de gestion des ressources humaines à Nice. Après avoir scruté les statistiques de 42 entreprises du CAC 40 sur la période de croissance économique et boursière 2002-2006, le chercheur aboutit à un résultat paradoxal : le seuil de 35% de femmes franchi (tant au niveau global qu’au niveau de l’encadrement), la productivité, la croissance, l’emploi et la rentabilité de l’entreprise sont en moyenne toujours meilleurs que ceux des entreprises moins féminisées. En revanche, leur cours de Bourse se situe 34% en-dessous de celui des entreprises comprenant moins de 35% de femmes ! Un paradoxe que le chercheur n’observe pas sur la période 2008-2009.
Pour expliquer cette apparente irrationalité des marchés, Michel Ferrary a son hypothèse. Elle tient compte de la différence de réactions des acteurs économiques entre périodes de crise et de croissance : «Les marchés ont tendance à accorder une prime à l’optimisme des prévisions en périodes fastes. Au contraire, les fondamentaux sont privilégiés en cas de crise» explique-t-il. L’une des caractéristiques du management féminin serait donc de présenter en la matière une plus grande prudence, et un moindre optimisme. Une hypothèse confirmée par plusieurs études s’attachant à déterminer les particularités féminines dans le domaine de la gestion d’entreprise.
Car à l’heure où plusieurs pays européens ont mis en place des législations favorisant la parité des conseils d’administration, il semble légitime de s’interroger sur les performances économiques de la gent féminine. Et les résultats obtenus n’ont souvent pas de quoi la faire rougir. Dans son enquête intitulée «Woman matter 2», McKinsley constate notamment laa supériorité des femmes en matière de leadership. Sur neuf critères élaborés par le cabinet de conseil pour juger de sa qualité*, les femmes en remplissent cinq mieux que les hommes, essentiellement relatifs à l’attention aux autres et à l’exemplarité, quand les hommes n’en remplissent que deux mieux (la prise de décision individuelle et le contrôle). Une étude publiée dans le Journal of Financial Economics sur la présence des femmes dans les conseils d’administration souligne également leur présence plus assidue, et leur tendance plus marquée à réunir et participer à des comités d’audit, de nomination ou de gouvernance interne. Elles favorisent les écarts resserrés entre les rémunérations et rendent davantage compte des mauvaises performances du prix des actions. Des qualités qui ne trouvent pas toujours grâce auprès des actionnaires, souligne l’étude, qui conclut qu’une présence accrue des femmes dans les CA ne sert pas l’entreprise à tous les coups, mais seulement quand le pouvoir des actionnaires est relativement faible.
* Les entreprises obtenant les meilleures notes sur chacun de ses critères sont aussi celles qui ont une marge opérationnelle deux fois plus élevée que les moins bien notées.
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