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A son décès, un défunt ne laisse que deux héritières : sa mère et sa soeur. Celle-ci souhaite alors renoncer à la succession en son nom propre et pour ses enfants mineurs au profit de sa mère.
C'est alors la mère du défunt qui se trouve attributaire de la totalité de l'actif successoral. Elle aurait souhaité dans la foulée consentir à ses petits-enfants la donation d'une somme correspondant au montant qu'ils auraient dû percevoir à défaut de renonciation à la succession.
Compte tenu des incertitudes planant sur ce montage, dont le but essentiel était de réduire le montant des droits de succession, l'administration avait été saisie de l'affaire par le biais d'une demande de rescrit. Celle-ci a finalement condamné fermement le schéma proposé, y voyant là un abus de droit (décision de rescrit n° 2008/17 (ENR) du 22 juillet 2008).
L'intérêt fiscal du montage était évident. Malgré la double taxation (aux droits de succession puis aux droits de donation), les montants des abattements et des tarifs applicables aux deux opérations auraient permis, en effet, d'alléger considérablement la facture finale.
Ainsi, la part successorale des renonçants successifs (la soeur et les neveux du défunt) revenant à la mère du défunt n'est taxée que sur la fraction excédant 151.950 euros et au tarif applicable aux mutations en ligne directe. La part ensuite reçue par chacun des petits-enfants (les neveux renonçants du défunt) du fait de la donation consentie par leur grand-mère (la mère du défunt) n'est soumise aux droits de donation qu'au-delà de 30.390 euros et au tarif applicable aux mutations en ligne directe.
Un intérêt purement fiscal
En l'absence de renonciation des neveux du défunt, ils ne peuvent bénéficier que du seul abattement de 15.195 euros de leur auteur renonçant (la soeur du défunt), qu'ils doivent se partager, et acquitter 55 % de droits de succession sur la part reçue ! Malheureusement, l'administration retient que cette double renonciation ne présente qu'un intérêt fiscal, ce qui l'a conduite sans surprise à invoquer l'abus de droit.
Il faut toutefois remarquer que le schéma soumis à l'administration est révélateur du caractère excessif du tarif des droits de succession en ligne collatérale, qui ne bénéficient pas des mesures législatives récentes visant à alléger les droits de succession.
Soulignons à cet égard que, au-delà de la situation particulière décrite, tous les montages qui permettent au renonçant de percevoir néanmoins sa part et qui ont pour seul intérêt d'éviter le poids excessif des droits de mutation entre collatéraux sont également susceptibles d'être remis en cause par l'administration.
Enfin, dans la situation décrite, tout risque de redressement serait évité si le défunt léguait d'abord ses biens à sa mère, celle-ci faisant ensuite donation des biens ainsi reçus à ses petits-enfants.
Si le résultat obtenu est identique, les neveux du défunt étant finalement bénéficiaires de la succession pour une facture fiscale allégée, la situation est bien différente, les actes accomplis étant d'une tout autre nature, non concomitants et réalisés entre des personnes distinctes à chaque étape.