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Tout bien considéré, il n'existe que trois stratégies d'investissement que tout un chacun peut suivre. La première, nous l'appellerons la stratégie de retour à la moyenne. C'est la stratégie la plus classique. L'investisseur analyse le titre, la monnaie, la matière première qu'il considère acheter ou vendre, et fait une estimation de la valeur moyenne à laquelle cet instrument devrait se traiter. Quand l'écart entre le marché et la moyenne devient trop grand , il agit. C'est ainsi que procèdent la plupart des analystes depuis leurs grands ancêtres Graham et Dodd, qui ont publié ensemble le premier livre classique sur l'analyse financière. Dans cette catégorie, citons aussi le retour à la parité des pouvoirs d'achat entre deux monnaies. Les taux de change retournent toujours à leur parité de pouvoir d'achat (différentiel d'inflation). Seul inconvénient, on ne sait jamais quand... Citons aussi le fait que les matières premieres voient toujours leurs cours retourner au coût marginal de production... La deuxième stratégie s'appuie sur l'analyse de ce qu'il est convenu d'appeler le « momentum ». Tout le monde connaît la célèbre plaisanterie du boursier endormi sur la plage à qui son fils dit : « Papa, la marée monte. » Ce à quoi le père répond : « Achète ! » Ce boursier était à l'évidence un adepte du momentum. Tous les partisans de ce qu'il est convenu d'appeler l'analyse technique utilisent (non exclusivement) des instruments fondés sur le momentum : acheter quand une valeur casse sa moyenne mobile à la hausse, c'est faire une analyse de momentum. La troisième est celle du « portage », ou carry trade en anglais. L'investisseur emprunte de l'argent à court terme, à 4 %, par exemple, pour acheter des actifs à long terme avec un rendement dont il espère qu'il sera supérieur a 3 %... C'est de loin la méthode la plus dangereuse, car si l'investisseur se trompe sur la rentabilité attendue de son placement long, ou si les taux à court terme se mettent à monter, il peut être proprement nettoyé et perdre beaucoup plus que le capital qu'il avait investi. C'est à propos de ces investisseurs que Warren Buffett dit que « c'est quand la marée se retire que l'on voit qui nageait sans maillot ». Toute la crise bancaire actuelle est le résultat de cette stratégie appliquée par des banques dont on aurait pu espérer qu'elles sauraient éviter les erreurs de débutants qui ont été commises. La question est donc pour le lecteur, quelle stratégie doit-il suivre à long terme, ou, plus exactement, quelle(s) stratégie(s) ai-je suivi(es) pendant toute ma carrière qui ne m'a(ont) pas trop laissé un goût de cendre dans la bouche ? La première des choses évidentes, c'est que l'on s'enrichit rarement avec l'argent des autres : je n'ai pour ainsi dire jamais utilisé l'emprunt ou le portage (carry trade). Trop dangereux, trop aléatoire. Je préfère laisser des professionnels comme les traders de la Société Générale suivre ce genre de politique. Ma stratégie préférée a toujours été le retour à la moyenne, tempérée par l'analyse du momentum. Prenons un exemple. Si une valeur est à 60, vient de 100 et que je considère qu'elle vaut 80, je surveillerai le titre et, tant qu'il baisse (ce qui peut être déterminé par une analyse de sa moyenne mobile), je n'interviendrai pas. S'il cesse de baisser, je commencerai à acheter. Quand l'objectif est atteint, ou si mon titre me déçoit (se remet à baisser), nouvelle analyse pour voir si quelque chose a changé, et on recommence... C'est de loin la stratégie la moins dangereuse, et celle qui sur le long terme donne les meilleurs résultats. Elle comporte donc deux parties. Une partie fondamentale, d'analyse et de valorisation. Une partie plus pratique, fondée sur le respect que tout un chacun doit avoir pour le marché. Compte tenu des baisses récentes, il me semble que le moment est particulièrement bien venu pour initier cette double stratégie et/ou renforcer des positions sur des valeurs de qualité, à Paris ou surles autres grands marchés internationaux, en incluant l'Asie, bien entendu. charlesgave@gmail.com