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Vous venez de publier vos résultats 2006. Quels enseignements en tirez-vous ?

Pour la cinquième année consécutive, le résultat net des activités de Wendel Investissement est en progression. La performance a atteint l'an dernier + 23 %, à 363 millions d'euros. Toutes nos filiales (Bureau Veritas, Materis, Legrand, Editis, Stallergènes et Stahl) ont concouru positivement à cette performance. Sur les douze derniers mois, notre actif net réévalué a progressé de 36 %, atteignant 117 euros par action.

Votre bilan depuis le changement de stratégie de Wendel en 2002 est-il positif ?

Depuis 2002, année où effectivement le groupe a amorcé son recentrage vers le métier de société d'investissement, le cours de l'action Wendel Investissement a grimpé de près de 50 % par an et notre capitalisation boursière a été multipliée par cinq. Cette performance montre que l'on peut être focalisé sur le long terme et néanmoins profitable. Nous investissons d'abord dans des sociétés offrant des potentiels de croissance et nous les amplifions : la croissance des ventes du groupe a été en 2006 de 11 %, dont 7 à 8 % de façon organique.

Quel a été le montant de vos investissements l'an passé ?

Nous avons investi près de 740 millions d'euros en fonds propres pour le rachat de quatre sociétés : Materis en France, Deutsch aux Etats-Unis, Stahl et AVR aux Pays-Bas. Globalement, ces dossiers représentent une valeur d'entreprise d'environ 4 milliards d'euros.

Vous avez annoncé que vous réfléchissiez à une cotation de Bureau Veritas pour le mois de juillet. Pour quelles raisons ?

Wendel Investissement est actionnaire de Bureau Veritas depuis une quinzaine d'années et la société s'est développée de façon remarquable, puisque son bénéfice opérationnel a, en moyenne, progressé d'environ 30 % par an sur la période. Il est devenu l'un des leaders mondiaux du secteur, aux côtés du suisse SGS et d'ITS, et il emploie près de 30.000 personnes dans 160 pays. Le groupe a besoin de plus de visibilité, et, dans un marché qui se consolidera dans les dix prochaines années, être coté peut s'avérer un atout. Le projet d'introduction, s'il voit le jour, ne sera en aucun cas un désengagement du groupe. Nous comptons conserver le contrôle de Bureau Veritas.

Un projet de rapprochement avec SGS n'aurait-il pas plus de sens qu'une introduction en Bourse ?

Nous n'avons eu aucun contact avec les dirigeants de SGS. Notre stratégie a permis de multiplier par cinq la taille du groupe en quinze ans et je ne suis pas persuadé qu'un rapprochement entre les deux sociétés créerait autant de valeur.

Depuis quelque temps, les opérations de LBO sont critiquées en France car elles sont jugées « faciles » puisque réalisées grâce au recours à l'endettement. Quel est votre point de vue ?

C'est une approche superficielle. L'argent facile n'existe pas. En ce qui concerne Wendel, nous nous intéressons à des entreprises dont nous estimons qu'elles offrent un potentiel de croissance sur leurs marchés. Nous laissons dans l'entreprise tout le cash-flow nécessaire à son développement et nous lui apportons, si besoin est, des moyens supplémentaires. Stallergènes ou Bureau Veritas par exemple, n'ont que très peu de dette.

Mais si du cash-flow reste disponible au-delà des besoins de l'entreprise, alors naturellement nous optimisons son bilan en ayant recours le cas échéant aux marchés de dette LBO.

Aucune opération de croissance externe ne sera annoncée dans les semaines à venir ?

Dans les semaines à venir, non. Il est possible que nous en réalisions dans les mois qui viennent, mais ce n'est pas une nécessité. Nous regardons sérieusement quatre à cinq dossiers par an seulement.

Cette prudence est-elle justifiée par l'inflation du prix de vente des entreprises non cotées ?

Il faut reconnaître que certains prix nous paraissent parfois déraisonnables. Mais Wendel, qui ne fait pas appel à des fonds de tiers et investit ses propres ressources, n'a aucune pression. Notre stratégie n'est pas d'investir à tout prix mais de trouver des entreprises où le potentiel de croissance et de création de valeur est important.

Pourriez-vous réaliser des opérations dans le coté plus que dans le non-coté ?

Pour nous, il n'y a pas de distinction à faire entre entreprise cotée et non cotée. La seule question est de savoir si une entreprise a ou non un potentiel de développement. Nous sommes des actionnaires professionnels et notre mission est d'aider les managements à faire les bons choix pour pérenniser l'avenir des entreprises, amplifier leur croissance et renforcer leur leadership.

Nous sommes, par exemple, restés un actionnaire de référence de Legrand après son introduction en Bourse, et nous comptons rester en contrôle. Je vous rappelle pour mémoire que la société introduite en Bourse depuis un an présente une hausse de son cours de Bourse de près de 25 %, alors que dans le même temps l'indice CAC 40 n'a progressé que de 5 %.

Etes-vous toujours intéressé par la reprise des activités environnement de Suez ?

Il est certain que si nous pouvions investir dans Suez Environnement à l'occasion d'une opération amicale, nous regarderions sérieusement le dossier. Mais, pour le moment, il ne me semble pas que ce soit d'actualité.

Quelle est la capacité d'investissement de Wendel aujourd'hui ?

Le groupe dispose d'une ligne de crédit immédiatement mobilisable de 1 milliard d'euros. Nous estimons notre marge de manoeuvre à environ 3 milliards d'euros de fonds propres pour les cinq prochaines années.

Depuis plusieurs mois, votre capitalisation boursière surcote par rapport à votre actif net réévalué, que faut-il en conclure ?

Que le marché commence à donner une valeur à l'équipe de Wendel et à son métier d'actionnaire professionnel !

Je crois qu'il n'est pas incohérent, avec la performance que nous connaissons depuis 2002, de se donner comme ambition de doubler notre valeur d'actif net par action d'ici cinq ans.